La sécu sous les feux de la rampe : une question de franchise

Si l’on parlait de la réalité des comptes de la Sécu, en tout cas de ceux de la branche maladie….en toute franchise, loin des franchises que Bachelot veut faire payer aux malades qui ont le mauvais goût d’être malade

J’ai choisi de présenter en document joint un diaporama réalisé par Attac 49 voici 3-4 années qui faisait en quelques dizaines de diapos un résumé de la problématique de la Sécu ; en particulier ce diaporama explique que le déficit est un prétexte car il est volontairement créé par les décisions de l’Etat. Les chiffres datent de 2004 mais font l’objet d’une actualisation-correction dans le document ci-dessous, téléchargeable comme le diaporama ; c’est un résumé qui montre que le déficit de la Sécu est un mensonge officiel.

Le vrai faux déficit de la Sécurité Sociale (SS)

Qu’est-ce qu’un déficit ? En comptabilité, c’est la différence entre des recettes et des dépenses. En matière de santé, le déficit peut être comptable, mais peut porter aussi un déficit social si la politique de santé n’est pas adaptée aux besoins de la population, à l’évolution de l’âge, des techniques, de la mortalité, etc… Or seul le déficit comptable, dont je vais démontrer que c’est une construction politique, est au cœur des débats.

Sur le seul plan comptable, attardons-nous sur les recettes puis sur les dépenses du régime général, à l’exclusion du régime agricole (MSA, fortement subventionné par l’Etat), des autres non salariés et des régimes spéciaux de salariés. Et rappelons que le régime général comprend 4 branches : la maladie, la vieillesse, la famille et les accidents du travail.

Les recettes sont pour l’essentiel des cotisations sur les revenus du travail (les cotisations « patronales », les cotisations « salariales » sous forme de cotisation ou de CSG) et les prélèvements sur les revenus du capital via la CSG.

Depuis le début des années 1980, la part des cotisations salariales s’est fortement accrue alors que les entreprises connaissaient un tassement de leurs contributions : maladie, vieillesse et chômage confondus, les cotisations « salariales » sont passées de l’ordre de 10 % à plus de 22 % tandis que celles des employeurs sont au plus de l’ordre de 45 %, comme voici 25 ans, voire beaucoup moins pour les bas salaires. La gauche envisageait de calculer les cotisations « patronales » sur la valeur ajoutée (VA), c’est à dire la richesse créée par les entreprises en lieu et place des salaires bruts : elle n’a jamais mis en œuvre cette idée alors que la part de la VA revenant aux salariés a baissé au profit de celles des capitalistes (70 points de PIB pour les salariés au début des années 80 contre 60 points maintenant soit 10 points de PIB en moins). Le manque à gagner est donc très important.

Les recettes sont sous-évaluées à cause de l’Etat-patron (Etat, collectivités locales et hôpitaux publics). En effet, le régime général couvre aussi les fonctionnaires, mais leur patron ne cotise pas sur les primes versées à ses agents, contrairement aux employeurs du secteur privé. Quand on sait que les primes représentent de 15 à 20 % des salaires du secteur public, le manque à gagner pour la SS est de 4,6 milliards d’Euros (Md€). Certes, il faudrait les prendre sur le budget de l’Etat, donc sur les impôts ; mais il s’agit de choix politiques et il importe de tenir un discours s’appuyant sur des chiffres vrais quand on parle du déficit de la SS.

Autres minorations de recettes, l’exonération de l’intéressement et de la participation, environ 4 Md€ et les stocks options pour 3 Md€, ces dernières bénéficiant à une infime minorité de cadres dirigeants de grands groupes. Ajoutons à cela les abattements pour les VRP et les journalistes (curieusement les média n’ont pas relevé cette mention de la Cour des Comptes), etc…soit un manque à gagner d’environ 1 Md€.

Autre problème, les exonérations de cotisations : si la plupart d’entre elles sont compensées par l’Etat, une partie n’est pas compensée et reste à la charge de la SS (2,1 Md€). De même, la couverture maladie des adultes handicapés (4 Md€) est à la charge de la SS, sans apport de cotisation, mais sans contrepartie de l’Etat, alors qu’il s’agit de la mise en œuvre de la solidarité nationale qui ne peut concerner les seuls assurés, encore moins le seul régime général (ce point demande à être validé).

La Cour des Comptes relève d’autres éléments que je n’ai pas retenus comme les exonérations des indemnités de départ en retraite et de licenciement, dont une part importante est exonérée…trop importante au profit des cadres supérieurs et dirigeants.

Au total, les recettes sont minorées de 14 à 15 Md€

Les dépenses posent de nombreux problèmes au premier rang desquels la taxe sur les salaires. Il s’agit d’un impôt payé par les employeurs qui ne sont pas assujettis à la TVA, comme les hôpitaux et les cliniques, les banques et assurances, les associations par ce biais. Elle n’a rien à voir avec les taxes sur les salaires comme la taxe d’apprentissage, la formation professionnelle, etc…car elle est une recette de l’Etat non affectée. Par le biais de cette taxe, l’Etat récupère près de 10 Md€, dont plus de 2 Md€ prélevés sur les seuls hôpitaux donc sur le budget de la SS.

Il conviendrait également de prendre en compte les accidents du travail non déclarés comme tels sur pression de l’employeur afin d’échapper à la cotisation spécifique à la seule charge de celui-ci. Par conséquent, c’est la branche maladie qui supporte une charge indue de plusieurs milliards.

Les dépenses pharmaceutiques pourraient être réduites, surtout (c’est un exemple) quand un même médicament coûte trois fois moins cher en Espagne…la Sécu supporte donc les frais de développement des laboratoires !

En conclusion comptable, le déficit de 2006 (8,7 Md€) est un mensonge officiel. La SS serait en réalité excédentaire de l’ordre de 10 Md€, hors mise en œuvre de prélèvement des cotisations sur la Valeur Ajoutée.

Par contre, il existe des dépenses « cachées » qui aggraveraient le déficit.

Tout d’abord la part qui reste à la charge des ménages soit à travers les mutuelles ou le solde à charge : 25 % des dépenses sont concernées…au premier rang desquelles on trouve l’optique et les soins dentaires, le forfait hospitalier, etc… Par conséquent, les plus démunis « préfèrent » ne pas consulter : or, différer des soins entraîne une dégradation de l’état de santé de la population.

Ensuite, une partie du personnel de l’hôpital est exploitée (CES, étudiants en formation, qu’il s’agisse d’AS, d’IDE ou de médecins) ou sous-payée (internes étrangers, personnel des cliniques).

En outre, un certain nombre d’investissements font l’objet de subventions des collectivités locales pour des matériels lourds ou de nouvelles constructions.

Si l’on prenait en compte la modification du calcul des recettes, mais aussi celle des dépenses, on aboutirait peut-être à un déficit, peut-être à un excédent. Mais, la question est de savoir quels objectifs de vie, de santé et de contrat social se donne une société. Et rappelons, ce qui est peu entendu, que la part de la santé en France rapportée au PIB est bien moindre qu’aux Etats-Unis (respectivement 9.5 % et 13.9 % du PIB) au système de santé privé et dur pour les pauvres, ou qu’en Allemagne (10.7 %), notre 1er partenaire en Europe.

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